Alors que le coût de vie n’a cessé de croître au cours des dernières années, beaucoup de jeunes adultes ont du mal à accumuler les fonds nécessaires pour accéder à la propriété. Dans ce contexte, de nombreux parents médecins s’interrogent sur leur capacité à donner, dès maintenant, une partie de leur patrimoine à leurs enfants, tout en respectant leur plan de retraite. Selon Shahla Tabti, représentante-conseil adjointe et gestionnaire de portefeuille – Gestion privée Fonds FMOQ, il est essentiel de réaliser une planification financière, avec et sans don, pour évaluer ses options.
La clé : bien planifier le don
Odile a 66 ans, son espérance de vie supposée est de 95 ans. Les actifs d’Odile sont constitués de 1 000 000 $ en régime enregistré d’épargne-retraite (REER), de 120 000 $ dans un compte d’épargne libre d’impôt (CELI) et de 1 000 000 $ dans un compte non enregistré. L’exercice de planification tient compte d’une inflation de 2,1 %, d’un rendement de 4 % et d’un coût de vie annuel de 84 000 $ (indexé annuellement). Chaque année, une cotisation au CELI est faite à partir du compte non enregistré.
Le tableau suivant compare les deux scénarios (tableau). L’analyse montre qu’il reste suffisamment d’actifs successoraux au décès. Cela veut dire que le coût de vie annuel projeté sera amplement couvert année après année, malgré des dons totalisant 200 000 $.
Tableau : Comparaison des deux scénarios
|
Actif au décès,
FERR |
Actif au décès,
CELI |
Actif au décès,
non enregistré |
Aucun don |
421 749 $ |
738 002 $ |
230 393 $ |
Don de 50 000 $ par an de 2025 à 2028 |
421 749 $ |
459 406 $ |
0 $ |
Aider au bon moment
Comme dans le cas d’Odile, c’est avec une planification financière rigoureuse que l’on peut savoir combien donner et quand. Les bienfaits de donner de l’argent à vos enfants sans attendre sont nombreux. Shahla Tabti souligne que l’avantage principal est d’aider au bon moment, lorsque les enfants, devenus adultes, en ont le plus besoin. « Si vous donnez une somme à votre enfant, alors qu’il a 30 ans, pour acheter sa première maison, l’impact sur sa vie sera plus important que si vous lui léguez des dizaines d’années plus tard, à votre décès, alors qu’il aura constitué son propre patrimoine. ».
Ou encore, votre ou vos enfants pourront dès maintenant utiliser ces fonds pour commencer à créer leur propre patrimoine, et épargner pour prévenir les impacts financiers d’éventuelles périodes difficiles comme une séparation ou une perte d’emploi. En ce qui vous concerne, il faut toutefois prendre en compte l’impôt qui peut être à payer l’année du retrait. Pour l’enfant, il n’y aura aucune incidence fiscale, puisque le don ne s’ajoute pas à son revenu imposable.
Au décès, la facture d’impôt sur vos placements risque d’être plus élevée que celle qui s’appliquerait à un retrait aujourd’hui. Donner de son vivant prend, encore là, tout son sens. Un choix qui devient encore plus significatif depuis les changements annoncés à l’impôt sur le gain en capital par le gouvernement fédéral à partir de juin 2024 : les profits supérieurs à 250 000 $ seront désormais imposés à un taux de 66 % au lieu de 50 %. Cependant, étant donné le contexte politique canadien, ces mesures pourraient être annulées rétroactivement
Équité et protection
Donner de l’argent de son vivant ne présente pas que des avantages. « Donner, c’est donner, aussi il ne faut pas espérer récupérer votre don un jour, par exemple s’il y a des tensions dans la famille », souligne Shahla Tabti. L’équité dans la fratrie peut être une source fréquente de tensions, et il est important de prévoir une répartition équilibrée. « Si vous avez plusieurs enfants, votre planification financière devrait en tenir compte. Par exemple, vous pourriez donner de l’argent à vos deux enfants de manière égale tout de suite, ou choisir de favoriser celui qui en a le plus besoin dans l’immédiat, tout en prévoyant une compensation pour l’autre dans votre testament ».
Par ailleurs, Shahla Tabti recommande toujours à ses clients de documenter leur don auprès d’un notaire afin de protéger l’enfant, un don ne faisant pas partie du patrimoine familial. Dans le cas d’Odile par exemple, si elle donne de l’argent à sa fille pour sa mise de fonds sur une maison achetée en couple, il faut prévoir d’exclure le don et son rendement du partage des biens en cas de séparation.
Planifier un don d’argent est essentiel. Une étude de votre situation réalisée avec rigueur et objectivité permet d’évaluer, entre autres, les répercussions financières, fiscales et celles liées à l’équité entre frères et sœurs.
Shahla Tabti, Pl.Fin.,CIMMD
Représentante-conseil adjointe et gestionnaire de portefeuille – Gestion privée Fonds FMOQ
*Prénom fictif. Avis de non-responsabilité : des simulations personnalisées sont nécessaires.
Sofia, 35 ans, se questionne sur les avantages potentiels de l’incorporation de sa pratique médicale : « Aurais-je droit à des réductions d’impôt ? Pourrais-je épargner davantage ? Quels seraient mes frais d’avocat et de comptable ? Quand est-il judicieux de m’incorporer ? »
L’un des principaux atouts de l’incorporation est la possibilité de reporter l’impôt sur les sommes accumulées dans la société, qui, autrement, seraient imposées comme revenus professionnels. Cela permet à Sofia d’accumuler son épargne plus rapidement.
Sans incorporation et en tant que travailleuse autonome, Sofia serait assujettie à l’impôt sur l’intégralité de son revenu annuel de 300 000 $ au taux marginal maximum de 53,31 %, ce qui la prive de la possibilité de différer son imposition.
Pour prendre une décision éclairée sur l’incorporation, il est donc essentiel d’évaluer le coût de la vie de Sofia.
Analyse de la situation de Sofia : hypothèses retenues
Étant donné que Sofia envisage de prendre sa retraite dans une trentaine d’années, l’incorporation de sa pratique médicale pourrait s’avérer bénéfique. Elle pourrait ainsi laisser des sommes s’accumuler à long terme au sein de sa société.
En revanche, si elle souhaitait prendre sa retraite plus tôt, l’augmentation récente du taux d’inclusion du gain en capital à 66,67 % pourrait influencer sa décision, rendant le statut de travailleuse autonome plus attrayant.
En outre, à titre d’actionnaire de sa société, Sofia pourrait se rémunérer par une combinaison optimale de salaire et dividende selon son coût de vie et en fonction de ses futurs projets. Une analyse effectuée en collaboration avec son expert-comptable serait à considérer. Pour le scénario présenté ici, nous avons retenu une rémunération par salaire uniquement.
En se versant un salaire, Sofia pourra accumuler des droits de cotisation à son Régime enregistré d’épargne-retraite (REER). Cela lui permettra de constituer des économies tant au niveau de sa société qu’à titre personnel. Ce revenu lui ouvrira également la voie à des cotisations au Régime des rentes du Québec (RRQ) et au Régime québécois d’assurance parentale (RQAP), essentiels pour bénéficier d’une rente de retraite et d’une prestation de congé parental, d’autant plus qu’elle envisage d’avoir un enfant. Si ce projet se concrétisait à court terme, il pourrait être avantageux pour Sofia de reporter l’incorporation de sa société d’un an.
Sofia partage sa vie avec Jérémy, son conjoint de fait, et le couple maintient une comptabilité séparée. Ensemble, ils possèdent une maison sous hypothèque. Le coût de la vie net annuel de Sofia s’élève à 85 000 $, incluant sa part du paiement de l’hypothèque et sa contribution aux dépenses ménagères.
L’avantage de l’incorporation : reporter l’impôt sur les sommes laissées dans la société
La pratique médicale de Sofia génère des revenus professionnels nets (avant salaire, impôts et charges sociales) de 300 000 $, déduction faite des dépenses d’affaires. Les frais supplémentaires associés à sa société (honoraires professionnels) s’élèvent à 4 000 $ par an.
Désireuse de maximiser son REER et son compte d’épargne libre d’impôt (CELI), qui lui permettent respectivement des droits de 31 560 $ et 7 000 $ en 2024, nous proposons de lui verser un salaire de 180 500 $ sans versement de dividende.
En tant que travailleuse autonome, Sofia réaliserait un surplus budgétaire de 68 850 $, ce qui lui permettrait de cotiser à son CELI tout en conservant environ 60 000 $ pour épargner, financer des projets ou rembourser des dettes, une fois ses impôts acquittés.
Cependant, en optant pour l’incorporation de sa pratique médicale, Sofia pourrait non seulement maximiser sa cotisation à son REER, mais aussi dégager un surplus budgétaire de 11 773 $ pour alimenter, entre autres, son CELI. De plus, elle bénéficierait d’un avantage fiscal supplémentaire de plus de 28 404 $ grâce au report d’impôt sur la somme de 85 481 $ laissée dans sa société.
Les montants accumulés chaque année au sein de sa société (en 2024, cela représente 85 481 $) fructifieront jusqu’au moment du décaissement, prévu dans une trentaine d’années. Les revenus de placement et les gains en capital générés par ces sommes seront imposables dans la société.
Une fois à la retraite, au début de la période de décaissement, il est probable que le taux d’imposition personnel de Sofia soit inférieur à celui qu’elle aura payé durant sa vie active. Lors du retrait des fonds détenus dans sa société, l’imposition se fera sous forme de dividendes ordinaires, qui pourront être étalés sur plusieurs années.
Il convient de noter que nous partons du principe que la société de Sofia est admissible à la déduction pour petite entreprise (DPE) au niveau fédéral (revenus passifs inférieurs à 50 000 $), avec un taux d’imposition de 9 %, mais non au Québec, où elle ne respecte pas le critère des 5 500 heures rémunérées et est soumise à un taux d’imposition de 11,5 %.
En tant qu’actionnaire-dirigeante de sa société, sa succession pourra bénéficier d’une prestation non imposable de 10 000 $ en cas de décès.
Sofia devra également prévoir certains coûts pour remplir ses obligations juridiques et fiscales, y compris les frais de constitution lors de l’incorporation de sa société par actions. Diverses résolutions juridiques et fiscales, ainsi que la production d’états financiers et de déclarations annuelles de revenus, seront nécessaires.
En plus de devoir déclarer sa société au Collège des médecins du Québec (CMQ), de s’inscrire à la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) et au Registraire des entreprises du Québec (REQ), Sofia devra maintenir à jour son livre des procès-verbaux.
TABLEAU COMPARATIF :
Revenus gagnés personnellement ou via une société par actions (SPA)
Revenu net professionnel : 300 000 $
Dépenses courantes (niveau de vie) : 85 000 $
Hypothèses utilisées pour la société : Salaire personnel, aucun dividende
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SANS SOCIÉTÉ |
AVEC SOCIÉTÉ |
Revenu net professionnel |
300 000 $ |
300 000 $ |
Frais supplémentaires (honoraires professionnels) |
s.o. |
-4 000 $ |
Salaire versé à l’actionnaire-dirigeante |
|
-180 500 $ |
Charges sociales de l’employeur |
|
-7 977 $ |
Revenu imposable au niveau de la société |
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107 523 $ |
Impôts estimés au niveau de la société (20,5 % en 2024) |
|
-22 042 $ |
Surplus disponible laissé dans la société |
|
85 481 $ |
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TRAVAILLEUR AUTONOME |
SALARIÉ DE LA SOCIÉTÉ |
Revenus |
|
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Revenu net professionnel ou salaire |
300 000 $ |
180 500 $ |
Cotisation REER |
-31 560 $ |
-31 560 $ |
Charges sociales : RRQ / RQAP / FSS |
-10 521 $ |
-4 812 $ |
Total |
257 919 $ |
144 128 $ |
Impôts estimés au niveau personnel (en 2024) |
-104 069 $ |
-47 355 $ |
Somme disponible après impôts |
153 850 $ |
96 773 $ |
Niveau de vie estimé |
-85 000 $ |
-85 000 $ |
Surplus budgétaire disponible au niveau personnel |
68 850 $ |
11 773 $ |
REER |
31 560 $ |
31 560 $ |
Surplus laissé dans la société |
s.o. |
85 481 $ |
Investissement potentiel total |
100 410 $ |
128 814 $ |
Somme additionnelle pouvant être investie dans la société par actions de Sofia |
28 404 $ |
* Avis de non-responsabilité : ce cas est fictif. Les impôts sont estimatifs. Des simulations personnalisées sont nécessaires.
Joanne Lebel, CPA, Pl. Fin., LL.M. Fisc.
Planificatrice financière et fiscaliste
Ariane et Xavier*, tous deux médecins dans la trentaine, se demandent quel est le montant optimal de leur couverture en assurance vie.
Tout d’abord, il faut comprendre que l’assurance vie constitue un outil essentiel pour procurer une sécurité financière à vos proches qui dépendent de vous financièrement advenant votre décès. De quels éléments devriez-vous tenir compte pour bien comprendre et chiffrer ce besoin?
Un besoin évolutif
Pour la plupart d’entre nous, le besoin en assurance vie suit le schéma ci-après : le patrimoine accumulé croît dans le temps et les besoins financiers des éventuels bénéficiaires diminuent avec l’âge. Ce parcours peut être divisé en trois phases :

Phase 1 : De l’enfance à la famille
Du point de vue financier, un enfant n’a pas besoin d’assurance vie (pas de dettes, pas de personnes à charge). La raison pour laquelle il peut valoir la peine de souscrire à une assurance sur la vie d’un enfant, est de protéger son assurabilité. En effet, il est possible que sa santé se détériore au fil des ans et qu’il ne soit plus assurable. L’assurance souscrite antérieurement lui permettra de financer des besoins futurs. À mesure que cet enfant grandit et s’endette pour étudier ou acquérir des biens durables (maison, voiture, etc.), son besoin d’assurance vie augmente progressivement.
Phase 2 : De la famille à l’indépendance financière
À partir du moment où cette personne fonde une famille, son besoin en assurance vie grimpe et culmine généralement à la naissance de son dernier enfant. C’est à ce moment que les besoins financiers des éventuels bénéficiaires (enfants) sont les plus importants. C’est aussi à ce moment que le patrimoine net se trouve généralement à un niveau plus bas par rapport aux années subséquentes.
Phase 3 : Postindépendance financière
On peut imaginer qu’un jour, le patrimoine accumulé par le particulier dépasse les besoins de ses éventuels bénéficiaires, car ils deviennent eux-mêmes financièrement indépendants. À ce moment, les besoins traditionnels d’assurance vie diminuent.
À la phase 1 de votre vie, les besoins en assurance vie sont minimes, voire nuls. C’est à la phase 2 que la question devient cruciale.
Comment déterminer le montant de votre assurance?
Avant tout, il n’existe pas de montant fixe ou de multiplicateur de revenu pour chiffrer l’assurance vie idéale à détenir. L’objectif premier de ce produit est de permettre à vos personnes à charge de maintenir leur train de vie advenant votre décès. Et puisque chaque famille est différente (revenus, dépenses, épargne, actifs, endettement, nombre d’enfants, leur âge, besoins particuliers, etc.), le montant optimal de l’assurance vie le sera aussi.
Généralement, on estime qu’un montant de 250 000 $ environ (entre 10 000 $ et 15 000 $ par année, selon diverses études) est nécessaire pour élever un enfant jusqu’à sa majorité. Il s‘agit d’une estimation qui devra être ajustée en fonction de votre train de vie et d’autres considérations (école privée, voyages, frais médicaux et autres). De plus, si l’enfant poursuit des études postsecondaires, la somme augmentera en conséquence.
Revenons au cas d’Ariane et Xavier. Ils ont deux enfants : un âgé de 5 ans et le deuxième de 3 ans. Le couple possède une hypothèque de 400 000 $ et aucune autre dette, sauf des soldes sur des cartes de crédit que les deux conjoints remboursent entièrement chaque mois. L’épargne des deux conjoints est comparable et s’élève à 150 000 $ pour chacun. Ils estiment qu’advenant le décès de l’un d’eux, le conjoint survivant aura besoin d’un revenu annuel supplémentaire de 50 000 $ par année, pour combler le revenu familial et maintenir le même coût de vie. Ils se demandent quel est le montant optimal de leur couverture en assurance vie.
Sans entrer dans les détails relatifs à la planification financière et successorale du couple, on peut estimer leur couverture optimale à environ 1 120 000 $ chacun, principalement en assurance vie temporaire. Ce montant pourra encore être majoré si le couple souhaite inclure le coût des études postsecondaires dans leur calcul ou autres considérations qu’ils auront déterminées avec leur planificateur financier. Il est à noter que, généralement, ce montant diminuera annuellement, car les enfants vielleront, l’épargne du couple croîtra et leur solde hypothécaire diminuera.
Idéalement, l’assurance vie doit s’inscrire dans une planification financière globale. Puisque chaque situation est unique, avec un même montant de couverture, vous pouvez vous retrouver sous ou sur-assuré. Si vous avez des questions relatives à vos assurances, n’hésitez pas à communiquer avec nous pour une planification financière personnalisée.
Stéphane Langlois
Représentant-conseil adjoint, gestionnaire de portefeuille Gestion privée Fonds FMOQ
Nombreux sont les grands-parents médecins qui aspirent à stimuler les ambitions académiques de leurs petits-enfants en leur ouvrant un régime enregistré d’épargne-études (REEE). C’est le cas de Réjean, qui a souscrit un REEE pour Noah, le fils de sa fille Martine. Cependant, Réjean a négligé d’inclure ce REEE dans sa planification successorale et se demande aujourd’hui quelle est la solution optimale pour faire respecter ses souhaits à son décès.
Stéphane Langlois, représentant-conseil adjoint, gestionnaire de portefeuille au sein de la gestion privée Fonds FMOQ, oriente les médecins comme Réjean vers les solutions adaptées à leur situation particulière. Voici ses conseils.
Un scénario à proscrire : l’absence de disposition testamentaire
Pour bien comprendre la suite, il convient de rappeler brièvement les modalités du REEE : le REEE demeure la propriété du souscripteur, c’est-à-dire de la personne qui est à l’origine de l’ouverture du régime. Au décès du souscripteur, le REEE devient un actif de sa succession, relevant des dispositions de son testament. Ainsi, Stéphane Langlois rencontre fréquemment des clients détenant des REEE qui constituent de ce fait une part de leur succession.
« Décéder sans testament représente le scénario le plus fâcheux. Le REEE se trouve alors intégré à la cagnotte de la succession. L’absence de planification peut entraîner des conséquences indésirables, notamment le désenregistrement du REEE, le remboursement des subventions et un impôt supplémentaire de 20 % sur le rendement. Les aspirations du défunt, de contribuer aux études de ses petits-enfants, risquent de ne pas être honorées », explique Stéphane Langlois. En effet, la valeur du REEE revient aux bénéficiaires de la succession, qui peuvent avoir des intérêts différents des souhaits de Réjean.
« Dans de telles circonstances, c’est le liquidateur qui prend les décisions », spécifie Stéphane Langlois. Ainsi, le liquidateur du testament de Réjean pourrait choisir d’attribuer le REEE à Martine dans sa part de l’héritage, et celle-ci le gérera au nom de son enfant. Une situation qui est idéale dans ce cas. « Cependant, en cas de désaccords, le liquidateur pourrait opter pour une répartition équitable de la valeur du REEE entre tous les héritiers ». Lorsque l’on met fin au REEE de cette façon, toutes les cotisations reviennent à la succession du souscripteur, mais toutes les subventions (qui devaient servir pour les études de Noah) sont remboursées au gouvernement.
Léguer le REEE au décès du souscripteur
« La plupart du temps, les individus respectent les volontés du défunt », souligne Stéphane Langlois, « mais l’inclusion d’une clause à cet égard offre une sécurité supplémentaire ». Réjean pourrait désigner Noah comme souscripteur remplaçant. « Les subventions demeurent réservées au bénéficiaire (le petit-enfant), mais Noah deviendrait alors propriétaire des contributions de son grand-père ». Noah étant encore mineur, Réjean devrait également désigner un administrateur des fonds, comme Martine par exemple.
Si Noah était majeur, et que Réjean s’inquiétait de sa capacité à gérer judicieusement ses finances, il pourrait choisir de nommer sa mère, Martine, en tant que nouvelle souscriptrice, car léguer le REEE aux parents des petits-enfants visés par ce régime représente une excellente solution. Les cotisations à ce moment-là sont transférées à Martine.
Aussi, sans prévoir spécifiquement le legs à titre particulier du REEE à Martine, le testament de Réjean pourrait prévoir que le liquidateur aura l’obligation d’attribuer et d’inclure le REEE dans le lot successoral de Martine, par exemple, si elle a droit à 50 % de la succession.
Transférer le REEE à un nouveau souscripteur avant le décès
Réjean n’aspire guère à continuer de s’occuper du REEE de son vivant, car ce type de régime implique une gestion importante comme la signature de formulaires, l’obtention de preuves d’études et la gestion optimale de l’actif et de son décaissement dans un délai relativement court. Pourtant, Réjean peut, dès maintenant, transférer les placements du REEE à un autre REEE dont Martine est la souscriptrice et Noah le bénéficiaire.
« Transférer le REEE à Martine, la fille de Réjean, de son vivant, permettrait à cette dernière de prendre en charge dès maintenant les complexités du régime », explique Stéphane Langlois. Martine assumerait officiellement le rôle de souscriptrice, à la place de Réjean. Étant fort probablement déjà impliquée dans la gestion financière de son fils, elle serait mieux à même de planifier les décaissements du régime.
Stéphane Langlois identifie également un autre avantage pour le grand-parent : « Si le petit-enfant n’entreprend pas d’études postsecondaires, l’impact fiscal sera probablement moindre pour Martine que pour Réjean. Par exemple, si Martine possède des droits de cotisation REER inutilisés, elle pourrait alors transférer les revenus du REEE vers ses REER. » Elle devra cependant rembourser les subventions versées.
Entre les mains de Réjean, ce scénario se traduirait aussi par le remboursement des subventions, mais également par une imposition avec pénalité qui peut monter jusqu’à 73,3 % sur les rendements du REEE, en tenant compte du taux marginal d’imposition du souscripteur et de la taxe additionnelle de 20 %.
Finalement, la planification successorale impliquant un REEE requiert toute votre attention afin de garantir la pérennité de vos intentions. L’inclusion d’une clause spécifique dans votre testament est un pas dans la bonne direction. Pour vous assurer d’analyser tous les scénarios possibles avant de prendre une décision, communiquez avec nous.
Avec la flambée des prix de l’immobilier, vous êtes nombreux à nous poser des questions d’ordre fiscal et juridique sur le don d’argent aux enfants. Analysons ce cas afin d’illustrer vos options et les précautions à prendre.
Mise en situation
Geneviève*, omnipraticienne de 54 ans, aimerait accorder une aide financière à sa fille Mélanie* pour l’achat de sa première maison. Mélanie est en union de fait avec Guillaume* depuis cinq ans. Le couple souhaite acheter une propriété au prix de 800 000 $. Chaque conjoint possède plus de 60 000 $ dans son REER. Le couple pourra donc retirer 120 000 $ dans le cadre du RAP pour la mise de fonds (15 % du prix d’achat).
Geneviève souhaite consentir un don d’argent de 100 000 $ à Mélanie afin d’augmenter la mise de fonds totale à 27,5 % du prix d’achat. Elle se questionne toutefois sur les répercussions fiscales de ce don et surtout se demande si Mélanie sera en mesure de récupérer sa mise de fonds excédentaire de 100 000 $ advenant la vente de la maison.
Analyse
La donation de 100 000 $
La donation d’une somme d’argent de 100 000 $, à même les fonds personnels de Geneviève, ne déclenche aucune incidence fiscale tant pour Geneviève que pour sa fille. Ce don n’est donc pas imposable pour Mélanie.
Geneviève pourra simplement remettre le montant par chèque ou par transfert bancaire à sa fille. Le prêteur hypothécaire pourrait cependant exiger une preuve écrite qu’il s’agit bel et bien d’une donation.
L’achat de la maison
En prévision de la signature du contrat d’achat de la maison, Mélanie transférera 160 000 $ au notaire et Guillaume lui un montant de 60 000 $ pour une mise de fonds totale du couple de 220 000 $.
Si aucune précaution n’est prise d’avance, le contrat d’achat sera au nom des deux acheteurs, sans aucune autre précision. Par conséquent, chaque conjoint détiendra une part indivise de 50 % dans la maison. En ce qui concerne le prêt hypothécaire de 580 000 $, chacun des conjoints devra assumer la moitié de chaque versement périodique et de chaque remboursement anticipé de capital.
Les inquiétudes de Geneviève
Geneviève a parfaitement raison d’être inquiète. Sachant que la propriété sera inscrite aux deux noms (chacun 50 %), elle se demande comment sa fille pourra récupérer le montant excédentaire de 100 000 $ en cas de vente. Notons que la question d’apports inégaux pourra devenir problématique non seulement en cas de vente, mais également en cas de séparation ou de décès d’un des conjoints.
Posons l’hypothèse que Mélanie et Guillaume se séparent quelques mois après l’achat de leur maison et qu’ils décident de la vendre. Afin de simplifier le scénario, supposons que la maison est vendue 800 000 $, sans commission de vente et que le solde de l’emprunt hypothécaire demeure encore à 580 000 $. À la suite de la vente de la maison, le notaire encaissera la somme de 220 000 $ au nom des vendeurs.
Puisque le contrat d’achat de la maison est au nom de Mélanie et de Guillaume, le notaire n’aura d’autre choix que de remettre 50 % de la somme (110 000 $) à chacun. Malgré la mise de fonds de 160 000 $, Mélanie ne récupèrera que 110 000 $. C’est tout comme si elle avait fait une donation de 50 000 $ à son conjoint au moment de l’achat (la moitié du don de 100 000 $). À défaut de démontrer que Mélanie a consenti un prêt ou une avance de 50 000 $ à Guillaume, elle sera généralement considérée lui avoir fait une donation.
Du point de vue de Geneviève, c’est comme si elle avait fait un don de 50 000 $ directement à Guillaume !
Comment protéger Mélanie… et donc Geneviève ?
Avant d’effectuer le don de 100 000 $ à sa fille, Geneviève pourrait exiger que Mélanie et Guillaume concluent une convention selon laquelle, en cas de vente de la maison :
- Geneviève pourra récupérer, en priorité, la somme de 100 000 $ sur le prix de vente et ensuite, les conjoints se partageront le reste (60 000 $ chacun selon notre exemple) ;
ou
- une fois le prix de vente partagé de façon égale entre les deux conjoints (110 000 $ à chacun, selon notre exemple), Guillaume devra remettre 50 000 $ à Geneviève.
Avec ces deux solutions, c’est comme si Mélanie avait consenti une avance de 50 000 $ à Guillaume, remboursable à la vente de la maison. Il est même possible de prévoir un rendement sur cette somme en faveur de Mélanie.
L’autre option consiste à prévoir des pourcentages différents dans le titre de propriété : 73 % pour Mélanie et 27 % pour Guillaume (au lieu de 50 % chacun). Par contre, les paiements hypothécaires devront être partagés dans le couple selon la même proportion.
Autres éléments à considérer
Consentement de conjoint marié
Puisque Geneviève est mariée sous le régime matrimonial de la société d’acquêts, le don de 100 000 $ à sa fille Mélanie pourrait exiger le consentement écrit de son époux.
Décès du donataire
Donner, c’est donner. Advenant le décès prématuré de Mélanie, Geneviève ne pourra normalement pas récupérer le montant de son don, à moins de mettre en place un mécanisme juridique fort complexe. Geneviève pourrait toutefois envisager un prêt d’argent aux deux conjoints, garanti par une hypothèque de 2e rang sur la maison.
Équité par rapport à d’autres enfants de la fratrie
Geneviève a aussi un fils de 14 ans. Pour des raisons d’équité, Geneviève pourrait prévoir dans son testament qu’advenant son décès, son fils aura droit à une somme additionnelle de 100 000 $, indexée ou non.
Mariage du donataire
Si Mélanie et Guillaume décident de se marier avant que Geneviève fasse le don, il serait préférable que Geneviève et Mélanie signent un acte de donation notarié. De plus, le contrat d’achat devrait indiquer que ce don est utilisé pour l’achat de la maison. Cette formalité sera très utile pour Mélanie en cas de divorce, lors de la liquidation du patrimoine familial.
Autre
Pour tirer le maximum de leur épargne, Mélanie et son conjoint devraient envisager de combiner l’utilisation du RAP au CELIAPP . Communiquez avec nous pour en savoir davantage.
Conclusion
Le don aux enfants peut avoir plusieurs répercussions fiscales, financières ou successorales. Notre équipe multidisciplinaire est à votre service pour vous accompagner dans ces projets.
* Noms fictifs.
L’acquisition et la vente d’une résidence représentent souvent un des projets les plus importants. De nombreux éléments entrent en ligne de compte : l’aspect « qualité de vie », le financement de l’acquisition, l’utilisation des REER par l’entremise du programme RAP (régime d’accès à la propriété), etc. La situation se complique quand l’apport des deux conjoints est inégal. Analysons un cas bien concret pour mieux illustrer le défi.
Situation
Josée et Michel* ont acheté une maison il y a dix ans à un prix de 400 000 $. Bien que la résidence leur appartienne moitié/moitié, ils n’ont pas versé le même montant pour la mise de fonds au moment de l’achat. Ainsi, l’apport initial de Josée s’élevait à 80 000 $ et celui de Michel à 20 000 $. Pendant toutes ces années, ils ont partagé 50 %/50 % les dépenses liées à l’habitation (hypothèque, taxes, assurance, réparations, électricité). Dix ans plus tard, le couple vend sa résidence à un prix de 700 000 $. Ils se demandent donc comment répartir le produit de la vente.
Options
Avant toute chose, précisons que dans ces situations, tout est question d’entente entre les conjoints, surtout s’il existe un écart important dans le montant de l’apport initial ou les paiements hypothécaires assumés. Puisque plusieurs options sont disponibles, il est pertinent de coucher sur papier les modalités de cette entente, en signant une Convention d’indivision. Si rien n’est stipulé par écrit, le Code civil du Québec présume que les conjoints détiennent leur résidence à part égale. Nous proposons au couple de procéder comme suit pour définir la juste part de chacun dans le produit de la vente.
Tout d’abord, puisqu’il reste encore une hypothèque de 225 000 $ sur la maison, la valeur à partager équivaut à 475 000 $. Puisque la résidence s’est appréciée de 75 % au fil du temps (700 000 $/400 000 $), nous pouvons présumer qu’il s’agit d’un rendement réalisé sur la mise de fonds initiale de chacun des conjoints. Le produit de la vente pourrait donc être réparti comme suit :
|
Josée |
Michel |
Mise de fonds initiale |
80 000 $ |
20 000 $ |
Appréciation de la mise de fonds (75 %) |
60 000 $ |
15 000 $ |
Valeur de la mise de fonds à la vente |
140 000 $ |
35 000 $ |
Reliquat à partager1 |
300 000 $ |
Répartition du profit résiduel |
150 000 $ |
150 000 $ |
Part totale de chaque conjoint |
290 000 $ |
185 000 $ |
1 Produit de vente net (700 000 $) moins les mises de fonds augmentées du rendement (140 000 $ et 35 000 $) moins le solde hypothécaire (225 000 $).
Notons ici que pour égaler leurs apports respectifs, les conjoints auraient pu décider, au moment de l’achat, que 30 000 $ de l’apport initial de Josée constitue un prêt à Michel (elle aurait pu exiger des intérêts associés à ce prêt ainsi que d’autres conditions de remboursement). Si Michel avait remboursé les 30 000 $ à Josée selon les conditions établies, leur apport initial aurait été 50 000 $ pour chacun. Dans ce cas-là, le produit de la vente aurait pu être partagé moitié/moitié.
Mises en garde selon le type d’union
Les conjoints de fait
N’étant pas protégés par les règles du patrimoine familial, les conjoints de fait peuvent être vulnérables dans le cas suivant : un des conjoints détient seul la résidence, et l’autre paie une portion de l’hypothèque et autres dépenses liées au logement. Peu importe le montant et la proportion des dépenses assumées par le deuxième conjoint, ces sommes versées au fil des ans ne lui confèrent aucun droit sur la résidence. Un contrat de vie commune sera assurément pertinent ici.
Les conjoints mariés
Contrairement aux conjoints de fait, les conjoints mariés sont protégés par les règles du patrimoine familial. Concrètement, cela signifie que la valeur accumulée sur une résidence principale durant l’union sera partagée entre les époux en cas de divorce. Toutefois, une résidence détenue par un des conjoints et entièrement payée au moment du mariage sera totalement exclue du partage. Donc, si vous détenez déjà une résidence dont le solde hypothécaire est relativement modeste, vous y gagneriez, en termes de gestion de risque, à acquitter totalement cette hypothèque avant le mariage. |
*Noms fictifs
Le legs de biens immobiliers soulève souvent de nombreuses questions. Dans le cadre de notre offre de planification financière, nous analysons, entre autres, les répercussions de ce genre de legs contenu dans le testament. Voici un exemple qui pourrait vous inciter à vous pencher sur le vôtre.
Situation
Suzanne* a 58 ans et possède un immeuble locatif d’une valeur de 700 000 $, lequel est grevé d’une hypothèque de 250 000 $. Elle a également une épargne enregistrée d’une valeur totale de 1 100 000 $, soit 1 000 000 $ en REER et 100 000 $ en CELI. Suzanne a récemment fait son testament. Elle a bien réfléchi sur la répartition de ses actifs entre son fils majeur et son conjoint afin que tout le monde y trouve son compte. Puisque son fils est déjà impliqué dans la gestion de son immeuble locatif, elle décide de le lui léguer à titre particulier sans qu’aucune condition ne soit rattachée à ce legs. Le résidu de ses biens sera remis en faveur de son conjoint, incluant notamment son REER et son CELI. Bien que cette décision lui paraisse la plus appropriée et adaptée à ses objectifs successoraux, elle demande quand même l’opinion de notre planificatrice financière, Jacinthe Faucher, notaire et fiscaliste.
Analyse
Après l’analyse du testament, nous constatons que les répercussions de cette décision peuvent s’avérer désastreuses pour sa succession, à savoir son conjoint qui est légataire universel. Au décès de Suzanne, son fils héritera, comme prévu aux termes du testament, de l’immeuble locatif. Ses autres biens, en l’occurrence son REER et son CELI, seront transférés en faveur de son conjoint. Toutefois, l’impact fiscal n’a pas été pris en compte dans la planification testamentaire.
Suzanne est au courant que des impôts seront à payer à la suite de son décès. Même si, d’un point de vue fiscal, il aurait été préférable de léguer d’autres biens en faveur de son fils (comme une résidence principale ou encore un produit d’assurance vie), elle préfère lui léguer ce bien puisqu’il en assurera la continuité. Ce dernier a coûté 450 000 $; Suzanne a utilisé 200 000 $ en dépenses en amortissement depuis son acquisition. Ainsi, le revenu imposable sur cet immeuble s’élève à 325 000 $, soit 125 000 $ de gain en capital imposable et 200 000 $ de récupération d’amortissement, pour un total d’environ 172 400 $ d’impôt à payer. De plus, l’immeuble est grevé d’une hypothèque.
Selon la rédaction actuelle du testament, le fils de Suzanne recueillera l’immeuble libre de toute dette ou charge fiscale, soit une valeur de 700 000 $ (puisqu’il est un légataire à titre particulier et donc n’est pas tenu aux dettes de la succession). Ces passifs, totalisant actuellement 422 400 $ (172 400 $ d’impôt à payer et 250 000 $ d’hypothèque), seront redevables par la succession de Suzanne, soit son conjoint, même s’il n’hérite pas de ce bien! Ainsi, avant de toucher au CELI et au REER, le conjoint de Suzanne devra payer les dettes de la succession, en retirant 100 000 $ du CELI et environ 685 000 $ du REER! Notez que le retrait du REER est imposable.
Recommandations
La solution proposée est la suivante : léguer l’immeuble en faveur de son fils, en ajoutant une condition au legs, à savoir assumer les dettes et impôts s’y rattachant. Ainsi, son fils héritera de l’immeuble, mais devra payer les versements hypothécaires et les dettes fiscales, à la suite de la disposition présumée au décès de Suzanne. Le conjoint, quant à lui, recevra, en franchise d’impôt, le REER et le CELI. Notons que ce dernier conservera son statut de compte d’épargne libre d’impôt, puisqu’il est légué en faveur du conjoint.
Il serait également possible de léguer le CELI en faveur de son fils. Ce montant pourrait servir à payer une partie des impôts rattachés à l’immeuble et à équilibrer davantage la valeur nette de sa succession entre ses deux héritiers.
Nous recommandons à Suzanne de réviser son testament. Elle peut en rédiger un nouveau ou encore l’amender par le biais d’un codicille.
Avez-vous des questions sur votre planification successorale et testamentaire ? Nous pouvons vous aider.
*nom fictif
La planification successorale dans le cas des familles recomposées n’est jamais facile : les conjoints doivent faire des choix, parfois douloureux, pour d’une part, ne pas bousculer le conjoint survivant dans son train de vie et d’autre part, éviter de désavantager ses propres enfants. Dans le cadre de notre offre planification financière, nous analysons , entre autres, les dispositions testamentaires de nos clients et portons à leur attention les situations potentiellement problématiques pouvant découler de leurs décisions. Bien que les noms sont fictifs, il s’agit des cas bien réels.
Situation
Linda et Roger* ont 63 et 65 ans respectivement. Ils sont mariés en deuxième union depuis 20 ans sous le régime de la séparation de biens. Ils possèdent deux résidences communes, entièrement payées, de même que des REER et des CELI. Linda est également actionnaire d’une société de professionnels, laquelle détient une importante épargne. Chacun d’eux a des enfants majeurs issus de l’union précédente. Ils ont tous deux rédigé leur testament sous la forme notariée. Selon ce dernier, le conjoint survivant hérite de tout le patrimoine du défunt. Au deuxième décès, leurs enfants respectifs devront se partager la masse de leur succession.
Linda et Roger sont convaincus d’avoir bien formulé leurs volontés : d’une part, le conjoint survivant peut continuer à bénéficier de leurs deux résidences et de l’ensemble de l’épargne après le premier décès et d’autre part, les enfants recevront leur juste part après le décès du conjoint survivant. Ils demandent tout de même à notre planificatrice financière de donner son avis sur leur façon d’exprimer leurs volontés.
Analyse
Comme c’est souvent le cas lors de la rédaction du testament, l’intention au départ est bonne, mais elle ne tient pas compte du fait que ce document demeure modifiable à tout moment par le testateur. Qu’est-ce que cela veut dire concrètement? Supposons que Roger décède le premier. Linda hérite de tout leur patrimoine commun. Toutefois, pour une raison X, sa relation avec les enfants du défunt se gâche. Elle peut modifier à tout moment son propre testament et léguer l’ensemble de leurs biens (qui sont devenus les siens) à ses propres enfants (elle a parfaitement le droit de le faire). Ainsi, les enfants de Roger se retrouveront déshérités et ne recevront rien du patrimoine de leur père. Cette situation peut s’appliquer de la même façon aux enfants de Linda si jamais c’est elle qui décède la première.
Comment rectifier le tir? Quelques options s’offrent au couple?
Recommandations
Tout d’abord, considérant leur patrimoine et leur intention de se léguer mutuellement tous les biens, les résidences pourraient être léguées en faveur du conjoint, en pleine propriété puisqu’elles ont été acquises par le couple. Toutefois, le risque subsiste toujours à l’effet que le conjoint survivant modifie son testament et lègue ces résidences en faveur de ses enfants, au détriment de ceux du défunt. Il est possible de contrer ce risque, en créant une substitution, c’est-à-dire un legs à charge de remettre les résidences après le décès du conjoint en faveur de leurs enfants respectifs. Cette solution est recommandée lorsqu’un bien a un caractère familial important et qu’on désire le garder dans la famille plus d’une génération. Nous proposons au couple d’envisager le legs des deux résidences aux enfants, en créant toutefois un droit d’usage en faveur du conjoint survivant pour un certain temps. Ainsi, durant cette période déterminée, le conjoint peut continuer à en profiter, et par la suite, elles seront remises à leurs propriétaires, en l’occurrence les enfants.
En ce qui concerne les REER, nous estimons qu’il serait préférable de les léguer en faveur du conjoint, en pleine propriété. En effet, les REER ne doivent pas être transférés dans une fiducie exclusive en faveur du conjoint ni d’une substitution, car ils deviendront imposables. Une autre option en regard des REER serait de les léguer en faveur du conjoint, mais à charge de remettre un certain pourcentage de la valeur des REER, disons 25 % (sans dépasser 50 % en tenant compte de l’impôt), en faveur des enfants. Encore faut-il que le conjoint ait des liquidités nécessaires pour couvrir cette charge. Puisque les deux conjoints possèdent une bonne épargne, ils peuvent envisager cette option.
Le CELI devrait également être légué directement en faveur du conjoint (et non en faveur d’une fiducie exclusive en faveur du conjoint) afin qu’il y ait transfert des cotisations effectuées par le défunt au CELI du conjoint. Autrement, le CELI cesse d’être un CELI au décès du titulaire.
Enfin, pour les actions de la société, la meilleure décision financière serait de les transférer dans une fiducie exclusive en faveur du conjoint. Ainsi, seul le conjoint aura droit, sa vie durant, aux revenus de ces actions et nul autre que le conjoint ne pourra toucher au capital, sa vie durant. Les fiduciaires verseront les revenus et peut-être le capital, en fonction des besoins du conjoint afin d’assurer son bien-être et le niveau de vie dont il bénéficiait avant le décès de son conjoint. Au décès du conjoint survivant, les enfants de Linda et de Roger deviendront bénéficiaires de la fiducie. Ainsi, la fiducie exclusive en faveur du conjoint assurera une protection du patrimoine et un contrôle sur les biens transmis dans la fiducie.
L’autre aspect important à considérer sera le choix des liquidateurs et du fiduciaire. Le conjoint survivant ne devrait pas agir seul comme liquidateur. Il serait préférable de nommer aussi un enfant dans chaque famille ou quelqu’un qui représenterait chaque famille, ou encore un professionnel indépendant. Les liquidateurs pourront agir à la majorité s’ils sont au nombre de trois. Cela éviterait un potentiel conflit d’intérêts et surtout une possible discorde entre les personnes intéressées. Quant au fiduciaire, le conjoint survivant ne pourra agir seul; il devra être accompagné d’un fiduciaire indépendant pour respecter les termes de la loi.
Si, comme Linda et Roger, vous vous posez la question sur les répercussions de vos décisions testamentaires, n’hésitez pas à communiquer avec nous.
*noms fictifs
Les frais de gestion ne font pas souvent l’objet de conversation entre le client et son conseiller. Toutefois, la question mérite qu’on y prête l’attention. Un de nos clients nous a demandé de donner un exemple chiffré pour comparer le montant disponible à la retraite si ses placements sont assujettis à des frais de gestion de 1 % (Fonds FMOQ) par rapport à 2 % (moyenne canadienne).
Claude a 55 ans et détient un REER de 511 000 $, investi en fonds communs de placement pour lesquels on anticipe un rendement annuel brut de 6 %. Avec les frais de gestion annuels de 1 %, son rendement annuel net s’élève à 5 %. Claude prévoit travailler encore 10 ans et cotiser annuellement 27 000 $ à son REER d’ici la retraite, soit approximativement la marge REER annuelle maximale. Selon les normes de projections de l’IQPF, il pourra bénéficier d’un revenu annuel de 75 000 $ provenant de son REER jusqu’à l’âge de 95 ans.
Imaginons maintenant que Claude doit assumer les frais de gestion annuels non pas de 1 %, mais plutôt de 2 %. Son rendement annuel net pour le même type de placements passera donc de 5 % à 4 %. Quelles seront les répercussions de cette augmentation de frais et surtout, comment ajuster le tir ?
SCÉNARIO 1 : AUGMENTER (SI POSSIBLE) SON NIVEAU D’ÉPARGNE D’ICI LA RETRAITE
Cette option signifie que l’épargne annuelle requise pour financer le même revenu annuel durant la retraite (75 000 $) doit passer de 27 000 $ à un peu plus de 46 100 $. Il s’agit d’une augmentation de plus de 70 %. L’effort d’épargne supplémentaire requis est tel qu’il pourrait s’avérer impossible à réaliser d’autant plus qu’il dépasse largement le plafond des droits de cotisation REER annuels octroyés par l’Agence du revenu du Canada.
SCÉNARIO 2 : ACCEPTER UN NIVEAU DE REVENU INFÉRIEUR DURANT LA RETRAITE
Avec un même effort d’épargne, c’est-à-dire 27 000 $ annuellement, il sera possible de financer un revenu annuel à la retraite de seulement 61 700 $ (plutôt que de 75 000 $). Il s’agit d’une diminution de plus de 13 000 $ par année (environ 18 %) par rapport au revenu de retraite souhaité.
SCÉNARIO 3 : REPORTER L’ÂGE DE RETRAITE
Maintenant, si l’épargne retraite annuelle demeure la même (27 000 $), et que l’on vise un revenu de retraite annuel de 75 000 $, Claude devra travailler environ 2,5 années de plus. En effet, une telle décision implique une épargne supplémentaire de 67 500 $ (pour ces 2,5 ans de travail de plus). Ce n’est pas tout. Ce scénario le privera de 187 500 $ (pour ces 2,5 ans de retraite en moins) dont il aurait pu profiter sans travailler.
Le tableau suivant résume ces situations :
|
Frais de gestion |
Épargne annuelle |
Revenu annuel |
Âge de retraite |
Scénario de base |
1 % |
27 000 $ |
75 000 $ |
65 ans |
Scénario 1 |
2 % |
46 100 $ |
75 000 $ |
65 ans |
Scénario 2 |
2 % |
27 000 $ |
61 700 $ |
65 ans |
Scénario 3 |
2 % |
27 000 $ |
75 000 $ |
67,5 ans |
EN CONCLUSION
Il peut parfois paraître superflu de s’attarder aux frais de gestion, d’autant plus qu’étant prélevés à même les fonds, ils peuvent facilement passer inaperçus. Toutefois, en illustrant l’impact du niveau de ces frais (1 % par rapport à 2 %) sur des éléments concrets (effort d’épargne supplémentaire, diminution de revenu de retraite, report de quelques années du projet de retraite), l’importance de contrôler ceux-ci devient évidente, surtout dans un environnement de rendements plus modestes qui sera peut-être notre nouvelle réalité pour les années à venir.
En d’autres mots, les bas frais de gestion des Fonds FMOQ seront un allié essentiel pour permettre une meilleure croissance de votre capital dans les prochaines années !