/  01 novembre 2023

Modifications au RRQ

La loi exige que tous les six ans, Québec tienne des consultations publiques. Ainsi une consultation publique sur le Régime de rentes du Québec (RRQ) s’est tenue en début d’année afin d’assurer la pertinence du régime et favoriser sa pérennité. À la suite de cette consultation, en mars 2023, le budget 2023-2024 déposé par le gouvernement du Québec contient notamment des propositions de modifications au RRQ. Elles viendront s’ajouter aux améliorations déjà apportées au régime, depuis 2019, lesquelles visent à augmenter les prestations dudit régime.

Améliorations apportées depuis 2019

Il s’agit avant tout de l’ajout d’un régime supplémentaire au RRQ qui, en deux étapes successives, bonifie les rentes de retraite :

  • 1er volet : depuis 2019, le taux de remplacement de revenu a été augmenté de 25 % à 33 % du maximum des gains admissibles (MGA), soit 66 600 $ en 2023. Le MGA représente le salaire maximal sur lequel est calculé la cotisation au RRQ. Cette modification fait en sorte qu’une plus grande proportion du salaire des participants sera remplacée à la retraite.
  • 2e volet : dès 2024, le MGA passera, sur deux années, de 66 600 $ à 75 900 $. Ce MGA bonifié sera appelé « maximum supplémentaire des gains admissibles (MSGA) ». Cette modification fait en sorte qu’un salaire plus important sera reconnu par le régime.

Pour les cotisants plus jeunes, l’augmentation potentielle des prestations de retraite sera effectivement substantielle. Toutefois, ces améliorations se feront graduellement à raison de 1/40 de l’amélioration pour chaque année suivant les années précitées (2019 et 2024). Donc, seuls les participants qui auront cumulé 40 ans de cotisations au régime supplémentaire, après 2019 et 2024, profiteront de la pleine augmentation des prestations. Sans surprise, ces bonifications entraînent une majoration des cotisations au RRQ depuis 2019.

Un régime en excellente santé financière

Avant même de considérer ces nouvelles modifications, le RRQ se trouve en excellente santé financière. La plus récente évaluation actuarielle du régime a été réalisée en date du 31 décembre 2021, et est disponible sur le site de Retraite Québec. On y projette la situation financière du régime jusqu’en 2071, en couvrant à la fois le Régime de base et le Régime supplémentaire en vigueur depuis le 1er janvier 2019. Les faits saillants de ce document sont particulièrement évocateurs.
L’évolution de la réserve du RRQ constitue un très bon indicateur de sa solidité financière. Voici quelques constats tirés de l’évaluation actuarielle :

  • La réserve totale au 31 décembre 2021 équivaut à 106 milliards de dollars ;
  • Les entrées de fonds (cotisations et revenus de placements) sont suffisantes pour financer les sorties de fonds pour chacune des 50 années de la période de projection (donc jusqu’en 2071). Cela signifie que, pour ces 50 années, on estime ne pas avoir besoin de puiser dans les réserves ;
  • La réserve du Régime de base devrait passer de 103 milliards de dollars au 31 décembre 2021 à un montant projeté de 847 milliards de dollars à la fin de 2071 ;
  • La réserve du Régime supplémentaire devrait passer de 3 milliards de dollars au 31 décembre 2021 à un montant projeté de 954 milliards de dollars à la fin de 2071.

La santé financière du régime est solide, c’est une excellente nouvelle. Même si l’évaluation ne couvre que 50 années futures, cela n’implique d’aucune façon que c’est la catastrophe par la suite. Le niveau des réserves projetées en 2071, un total de 1 801 milliards de dollars, devrait être également rassurant. Même exprimé en dollars constants, il s’agit de 6371 milliards de dollars d’aujourd’hui, soit 6 fois la réserve actuelle ! Bref, le RRQ est en excellente
santé financière !

Des mesures retenues pour 2024

Lors de la consultation publique de début d’année, plusieurs propositions de modifications au RRQ furent présentées et étudiées, dont trois ont été retenues. Elles seront apportées à partir du 1er janvier 2024.

Mesure 1 : La modification des règles de calcul de la rente de retraite. Elle corrigera notamment un effet pervers sur le calcul de rentes pour ceux qui toucheraient des revenus cotisables plus faibles après 65 ans.

Le calcul de la rente de la RRQ est fonction du revenu de travail d’une personne durant toutes les années où des cotisations sont versées dès l’âge de 18 ans. Lorsqu’une personne demande sa rente de retraite après 65 ans, la période de calcul est ainsi prolongée. Dès janvier 2024, les revenus de travail modestes d’une personne âgée de 65 ans et plus ne feront plus baisser sa moyenne de gains, utilisée pour calculer sa rente de retraite. Ainsi, les personnes qui ne cotisent plus au RRQ à partir de 65 ans ou qui y cotisent moins (en raison de revenus de travail plus faibles) pourraient bénéficier d’un report plus profitable du début des prestations après 65 ans.

Mesure 2 : Le paiement de cotisations au RRQ facultatif pour les prestataires d’une rente de retraite de 65 ans ou plus qui continuent à travailler. En plus d’assurer une meilleure harmonisation avec le Régime de pensions du Canada (RPC), cette proposition offrira une plus grande flexibilité aux travailleurs d’expérience. Cette modification viendra notamment corriger un effet pervers pour les prestataires de rentes qui travaillent après 65 ans mais dont l’espérance de vie est réduite.

Actuellement, une personne qui travaille doit cotiser au RRQ, même si elle reçoit sa rente de retraite. Cela lui permet de recevoir un supplément (indexé et viager) à sa rente de retraite. Dès janvier 2024, les personnes de 65 ans et plus qui reçoivent leur RRQ auront le choix de ne plus y cotiser.

Toutefois, pour bénéficier d’un arrêt de cotisations, il faudra demander le début du paiement de la rente du RRQ.

Mesure 3 : Le report de deux ans de l’âge maximal d’admissibilité à la rente de retraite. Ainsi, les participants pourront demander un report du début du versement de leur rente aussi tard qu’à l’âge de 72 ans.

Cette modification permettra de mieux gérer le risque de longévité et assurerait aux prestataires une plus grande proportion garantie de leurs revenus de retraite.

Il est à noter que les trois mesures retenues n’auront pas pour effet d’augmenter le taux de cotisations au RRQ ; ce dernier continuera d’augmenter en raison des bonifications entreprises en 2019. Donc, ces trois nouvelles modifications ne coûteront pas plus cher aux cotisants.

Une mesure non retenue

Le report de l’âge minimal pour recevoir une prestation de retraite de 60 à 62 ans a été la piste de réflexion la moins populaire et n’a pas été retenue, la majorité des intervenants l’ayant dénoncée. Elle ne figure donc pas au budget du Québec.

Questions de planification pour chacune des mesures

Concrètement, quelles répercussions auront ces modifications quant à votre planification financières ?

Mesure 1 : La modification des règles de calcul de la rente de retraite. Relativement technique, cette mesure rendra plus profitable le report du début de la rente de retraite du RRQ pour ceux qui ne touchent plus de salaire après l’âge de 65 ans. Les médecins incorporés qui travaillent encore après 65 ans pourraient vouloir revoir leur mode de rémunération (salaire et dividendes ou une combinaison) en lien avec cette modification.

Mesure 2 : Le paiement de cotisations au RRQ facultatif pour les prestataires d’une rente de retraite de 65 ans ou plus qui continuent à travailler. Cette mesure offre de nouvelles options au médecin qui travaille toujours après l’âge de 65 ans. Il y en a trois :

  1. Vous pourrez reporter le début du versement des rentes durant la période de travail et continuer à cotiser au RRQ.
  2. Vous pourrez choisir de commencer à recevoir la rente du RRQ et décider de continuer d’y cotiser pour aller chercher le supplément de rente (une augmentation annuelle).
  3. Vous pourrez choisir de commencer à recevoir la rente du RRQ, mais cesser d’y cotiser.

De très nombreuses variables auront un impact sur votre décision, notamment, l’espérance de vie, les autres sources de revenus, le taux d’imposition, la situation familiale, etc. Consulter un spécialiste sera assurément profitable.

Mesure 3 : Le report de deux ans de l’âge maximal d’admissibilité à la rente de retraite. Avec cette mesure, votre rente de retraite pourra augmenter de près de 59 %2 entre l’âge de 65 et 72 ans (en dollars constants). Ici aussi, l’espérance de vie sera un des facteurs déterminant pour prendre votre décision.

En conclusion

Ces propositions corrigent certaines iniquités et améliorent la flexibilité du régime ; en d’autres mots, il s’agit d’annonces positives. N’hésitez pas à communiquer avec nous afin d’optimiser l’utilisation de ces nouvelles mesures.

 


1. En utilisant la Norme d’inflation de l’IQPF de 2,1 %
2. 7 années de report, soit de 65 à 72 ans, pour une augmentation annuelle de 8,4 %, (7 x 8,4 % = 58,8 %).