/  19 novembre 2003

Le refinancement hypothécaire, un pensez-y-bien !

En raison des taux d’intérêt relativement bas et de l’augmentation de la valeur des propriétés, plusieurs personnes songent à utiliser leur hypothèque pour rembourser certaines dettes dont les taux d’intérêt sont élevés (cartes de crédit, prêts à la consommation, etc…), pour rénover la maison ou encore pour investir dans des REER ou d’autres placements.

Il s’avère possible de profiter de l’évaluation à la hausse de sa maison, car les prêteurs consentent généralement des prêts représentant jusqu’à 75 % de la valeur de la propriété. En pratique, le refinancement hypothécaire consiste à emprunter un montant supérieur au solde dû afin de libérer des capitaux (communément appelé « l’équité ») susceptibles d’être utilisés par l’emprunteur comme bon lui semble.

Les établissement bancaires proposent aussi certaines options qui combinent prêt hypothécaire et marge de crédit afin de donner accès à des liquidités, à des conditions avantageuses. Souple, la marge de crédit (préautorisée) avec garantie hypothécaire offre un prêt en main sans avoir à solliciter l’institution chaque fois que l’emprunteur a besoin de financement, les fonds étant libérés sans autre formalité.

Aussi séduisant que soit le refinancement hypothécaire, il faut être très prudent avant de s’en prévaloir. Il faut impérativement en évaluer les avantages, prévoir les coûts inhérents à la transaction et déterminer avec précision sa capacité de remboursement.

Depuis les changements apportés au Code civil du Québec, en 1994, certains actes hypothécaires permettent une majoration du solde sans qu’il soit nécessaire de passer chez le notaire. Auparavant, un nouvel acte hypothécaire notarié était nécessaire, ce qui occasionnait des frais importants. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que des frais d’évaluation et des pénalités pourraient être exigés, si le terme du prêt n’était pas arrivé à échéance. Dans certains cas, il est possible de renouveler avant terme et d’obtenir un taux pondéré qui tienne compte à la fois du taux d’intérêt en vigueur et de celui de l’hypothèque.

REFINANCER POUR CONTRIBUER AU REER ?

Pour une personne qui ne possède pas les fonds nécessaires pour contribuer à son REER et qui dispose de contributions inutilisées, il pourrait être intéressant de le faire grâce à un refinancement hypothécaire. En effet, bien que les intérêts ne soient pas déductibles lorsque les placements sont effectués dans un REER, il en résulte un avantage certain en raison de la déduction fiscale et du rendement à l’abri de l’impôt.

Prenons l’exemple d’une somme de 52 000 $ (incluant les droits inutilisés) admissible au REER et d’une cotisation équivalente effectuée grâce à une augmentation du prêt hypothécaire existant.

D’une part, en supposant que le retour d’impôt (25 000 $ selon un taux marginal de 48 %) serait appliqué immédiatement à la diminution de l’emprunt, il faudrait verser quelque 3 500 $, en frais d’intérêt pour rembourser le solde de 27 000 $ à un taux hypothécaire de 5 %, amorti sur 5 ans. Les mensualités seraient d’environ 500 $.

D’autre part, la valeur accumulée du placement de 52 000 $ dans le REER totaliserait plus de 66 000 $, après la même période de 5 ans, si l’on tient compte d’un rendement de 5 %, soit une plus-value nette de 10 500 $ (c’est-à-dire 14 000 $ de rendement moins 3 500 $ en frais d’intérêt).

À plus longue échéance, en considérant un rendement fixe de 5 %, le même placement de 52 000 $ vaudrait environ 84 700 $ après 10 ans, et à plus de 108 000 $ après 15 ans.

REFINANCER POUR INVESTIR DANS DES PLACEMENTS NON ENREGISTRÉS ?

Dans certains cas, le refinancement pourrait rendre les intérêts déductibles d’impôts, alors que ce n’est pas le cas pour les intérêts versés sur un prêt accordé lors de l’achat d’une résidence personnelle.

Par exemple, réemprunter 52 000 $ sur sa propriété pour l’investir permettrait de déduire les frais d’intérêts, pourvu que l’argent soit utilisé à une fin admissible (par exemple, un placement dans le marché boursier). Deux jugements de la Cour suprême du Canada rendus dans les affaires Ludco et Singleton se sont avérés favorables aux contribuables, en facilitant ce genre de transactions sans pour autant refuser la déduction fiscale.

Par contre, lorsqu’on utilise l’effet de levier que constitue le financement des placements par emprunt, il faut s’attendre à ce que l’investissement rapporte plus qu’il n’en coûte. Souvent, cela peut signifier un risque accru qui ne convient pas à tous les types d’investisseur.

REFINANCER POUR INVESTIR DANS L’IMMOBILIER ?

Il est possible d’envisager l’achat d’un immeuble locatif et d’obtenir la mise de fonds nécessaire en refinançant sa maison, les intérêts déductibles s’appliquant à la totalité du prix payé.

Par exemple, l’achat d’un duplex de 200 000 $ est assorti d’une hypothèque de
150 000 $ (75 % de la valeur marchande). La différence, soit 50 000 $ obtenus à même le refinancement de la résidence personnelle (ou la marge de crédit hypothécaire obtenue), permettrait de déduire les intérêts sur 200 000 $. Ainsi, dans le cas d’un taux marginal d’imposition de 50 %, cela aurait pour effet de réduire de 50 % le coût réel de l’emprunt.

REFINANCER POUR REMBOURSER DES DETTES PERSONNELLES OU POUR RÉNOVER SA PROPRIÉTÉ ?

Le refinancement pourrait être une solution lorsque le niveau important d’endettement d’une personne est une source de stress et d’anxiété, voire d’angoisse. Par contre, une telle démarche ne doit pas devenir une incitation à consommer davantage, surtout si la personne endettée éprouve de la difficulté à gérer ses affaires. En pareille situation, la somme empruntée devrait être remboursée rapidement, et les habitudes de consommation, considérablement modifiées. Autrement dit, une meilleure discipline s’imposerait d’elle-même.

Quant au propriétaire qui prévoit des rénovations importantes à sa propriété, une augmentation de son prêt hypothécaire pourrait être envisagée pour financer les travaux, à moindre coût, vu les taux moins élevés.

CONCLUSION

Il existe différents produits sur le marché, dont les hypothèques à taux variables et la marge de crédit hypothécaire, en fonction des besoins de chacun. Généralement, les établissements prêteurs ciblent une clientèle dont le solde hypothécaire est faible, compte tenu de la valeur de la propriété, et qui jouit d’une bonne situation financière.

Il faut éviter de privilégier le refinancement de façon systématique et en vérifier la pertinence, car bien qu’il s’agisse d’une solution intéressante à première vue, cette stratégie peut s’avérer risquée et dénuée d’intérêt sur le plan financier. Par exemple, aussi attrayant qu’il puisse être sur le plan fiscal, le levier financier (qui consiste à emprunter pour investir) n’est pas recommandé à tous les investisseurs.

N’hésitez donc pas à consulter votre conseiller afin de bien évaluer tous les facteurs et de vous assurer d’en tirer des bénéfices concrets.