/  18 juin 2006

L’abolition de la limite de contenu étranger des régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER)

Un peu d’histoire

Dans les régimes enregistrés, le contenu étranger a été longtemps assujetti à une limite qui a varié au fil des ans. D’abord fixé à 10 %, ce plafond a été graduellement augmenté de   2 % par année à compter de 1991. Cette hausse a réjoui les investisseurs institutionnels (dont d’importantes caisses de retraite) qui se plaignaient à plus d’un titre de cette contrainte. D’abord parce qu’elle les forçait à investir 80 % de leur portefeuille au Canada, ensuite parce qu’elle les empêchait de profiter pleinement des rendements plus attrayants des bourses étrangères (en particulier celle des États-Unis), alors que notre huard ne volait pas bien haut.

Le plafond a été maintenu à 20 % jusqu’en 2000, année où il a été haussé à 25 %, avant d’être porté à 30 % en 2001. Les investisseurs canadiens ont applaudi cette mesure et réagi assez rapidement en augmentant leurs positions en actions étrangères. Toutefois, le moment s’est avéré plutôt mal choisi, car cette période a coïncidé avec un creux historique pour le dollar canadien qui valait alors 0,64 $US. De plus, la Bourse canadienne s’apprêtait à connaître une de ses meilleures surperformances par rapport aux autres actions étrangères propulsées par un prix du pétrole et des matières premières à la hausse.

En 2005, à l’occasion de son budget, le ministre des Finances du Canada a annoncé l’abolition définitive de la limite de 30 % qui restreignait la proportion des avoirs pouvant être investis en titres étrangers. Cette décision a surpris la plupart des investisseurs qui n’ont cependant pas modifié de façon importante les répartitions géographiques de leurs placements. Cela n’est pas surprenant étant donné que seulement 18 % des fonds de pension détenaient effectivement 30 % de titres étrangers, selon une étude de la firme AON. C’est d’autant moins étonnant que les investisseurs ont obtenu d’excellents rendements récemment avec leurs actions canadiennes, alors que leurs positions américaines ont subi les contrecoups de la hausse importante (35 %) du huard au cours des trois dernières années.

L’avenir

Maintenant que les possibilités de placement dont jouissent les investisseurs sont élargies, ils doivent se poser la question suivante : puisqu’il n’y a plus de contrainte quant au contenu étranger, quel pourcentage des investissements devrait être investi à l’extérieur du Canada?

Sans connaître précisément la réponse, on peut affirmer que, conformément aux principes de diversification caractérisant une gestion de portefeuille saine, il serait avisé d’investir au moins la moitié des actions à l’extérieur du Canada. En effet, le marché boursier canadien ne représente que 3 % de la capitalisation boursière mondiale et il est très concentré dans trois secteurs économiques : les services financiers (30 %), l’énergie (30 %) et les matières premières (15 %). Ces deux derniers secteurs sont d’ailleurs très cycliques. D’importants secteurs non cycliques tels que les soins de santé (1 %) et les produits de consommation (3 %) sont quasiment inexistants dans l’univers boursier canadien.

Il faut aussi prendre un peu de recul et réaliser qu’en dépit de la bonne tenue de la bourse canadienne depuis 5 ans, ce sont encore les actions mondiales qui ont offert le meilleur rendement à long terme, comme l’indique le tableau ci-dessous.

Rendements au 31 mars 2006

Indice Rendement annuel composé
5 ans
Rendement annuel composé
25 ans
S&P/TSX (Canada) 11,7 % 9,8 %
MSCI monde ($CAN) 0,6 % 11,5 %

Ce rendement plus élevé des actions mondiales a même été obtenu avec un niveau de risque (une volatilité) moindre. Tout modèle de répartition d’actifs basé sur ces statistiques à long terme militerait donc en faveur d’un portefeuille contenant un fort pourcentage d’actions mondiales.

La réalité n’est toutefois pas aussi simple. Les gens préfèrent investir dans ce qu’ils connaissent le mieux et, conséquemment, dans ce qui est plus près d’eux. Ce phénomène est déjà observé dans la plupart des pays qui n’imposent pas de limite de contenu étranger (États-Unis, Royaume-Uni, Australie, etc.)

Il n’est donc pas possible de prévoir quel pourcentage des régimes de retraite (REÉR, fonds de pension, etc.) sera investi à l’étranger d’ici quelques années.

Si votre réticence à investir davantage à l’étranger est fondée sur les possibilités que le dollar canadien continue à s’apprécier et provoque des pertes de change qui nuiront à vos investissements, sachez qu’il est maintenant très facile d’investir à l’étranger, tout en vous prémunissant contre les variations du taux de change. Parlez-en à votre conseiller financier!