/  19 mars 2004

En cas d’incapacité – I

Notre régime juridique prévoit la possibilité de nommer diverses personnes pour agir en notre nom lorsque nous ne nous sommes plus en mesure de le faire. Comme il existe des différences importantes quant aux rôles et aux responsabilités de ces intervenants, nous les aborderons dans le cadre de trois chroniques dont la première traite des rôles du liquidateur et du fiduciaire.

Le liquidateur

Autrefois appelé « exécuteur testamentaire », le liquidateur est la personne chargée de veiller à l’exécution des volontés d’une personne décédée, tout en protégeant les intérêts des héritiers.

Règle générale, son rôle en est un de simple administration, mais il peut être plus large si le défunt en a décidé ainsi dans son testament. Le liquidateur commence son travail au moment du décès et le termine à l’occasion du partage des biens entre les héritiers.

Comme la loi permet de désigner un ou plusieurs liquidateurs dans un testament, il est possible de prévoir plusieurs personnes pour liquider sa succession. Chacune d’elles se voit alors confier les tâches que ses compétences particulières lui permettent d’exécuter le plus efficacement.

Le choix du liquidateur revêt une grande importance, car il doit assumer diverses responsabilités légales et fiscales. Outre les arrangements funéraires et l’obtention du certificat de décès, il doit notamment :

  • ouvrir un compte dans une institution financière;
  • s’assurer, en effectuant des recherches auprès du Barreau du Québec ou de la Chambre des notaires du Québec, que le testament est bel et bien le seul (ou le dernier) de la personne décédée;
  • faire homologuer le testament, s’il y a lieu;
  • identifier les héritiers;
  • faire l’inventaire de la succession;
  • évaluer les biens;
  • préparer les déclarations de revenus;
  • payer les dettes et recouvrer les créances;
  • administrer les biens de la succession jusqu’au partage;
  • effectuer le partage des biens après avoir obtenu le certificat de décharge requis par les lois fiscales.

Le Code civil prévoit que tout liquidateur, qu’il soit ou non l’un des héritiers, a droit au remboursement des dépenses engendrées par ses fonctions. S’il n’est pas l’un des héritiers, il a également droit à une rémunération. S’il est héritier, il peut être rémunéré, à la condition que le testament le prévoit ou que les héritiers le décident. Si la rémunération n’a pas été fixée par le testateur, elle l’est par les héritiers ou encore par le tribunal, en cas de désaccord entre ces derniers. Il est donc préférable que le testament soit clair et précis sur la rémunération du liquidateur, laquelle constitue un revenu imposable.

En l’absence de testament, tous les héritiers sont responsables de l’administration des biens. Ils peuvent cependant choisir de désigner, à la majorité des voix, un liquidateur de la succession.

Enfin, il faut rappeler que seule une société de fiducie peut agir à titre de liquidateur d’entreprise.

Le fiduciaire

Le fiduciaire est une personne, physique ou morale, désignée pour assurer la gestion du patrimoine fiduciaire.

La fiducie peut être « entre vifs » afin de protéger des actifs et de fractionner des revenus avec des bénéficiaires majeurs. La création de ce genre de fiducie est constatée dans un document juridique (l’acte de fiducie) qui contient les dispositions voulues par le constituant de la fiducie.

La fiducie peut également être « testamentaire ». Elle est alors créée dans le cadre d’un testament, au moyen d’un legs en fiducie. Il ne faut pas confondre les biens en fiducie avec le compte en fiducie qui est un contrat entre une institution financière et une personne agissant pour une autre.

Même si les biens en fiducie n’appartiennent pas au fiduciaire, ce dernier doit les administrer. Ce travail est assujetti aux règles légales pertinentes. Le fiduciaire a notamment la responsabilité de protéger le patrimoine fiduciaire et de le faire fructifier pendant la durée de la fiducie. Il doit agir de façon prudente et diligente, conformément aux dispositions énoncées par l’auteur de la fiducie, et toujours dans l’intérêt du ou des bénéficiaires.

Dans le cas d’une fiducie testamentaire, le fiduciaire commence son travail au moment de la création de la fiducie, c’est-à-dire au moment où le liquidateur lui remet le legs en fiducie. Son rôle prend fin lors de la distribution des biens au(x) bénéficiaire(s) du capital, au moment prévu dans le testament.

De toute évidence, la charge d’un fiduciaire s’étend sur une période plus longue que celle d’un liquidateur.

Le bénéficiaire d’une fiducie ne peut en être le seul fiduciaire, mais il peut agir à titre de cofiduciaire. Plusieurs fiduciaires peuvent être nommés. Le cas échéant, ils prendront leurs décisions à l’unanimité ou à la majorité des voix.

Les biens en fiducie constituent un patrimoine distinct de ceux du constituant de la fiducie, du fiduciaire et du ou des bénéficiaires. La fiducie constitue donc un patrimoine propre et distinct qui n’appartient à personne.

Le legs de biens en fiducie permet de soustraire le patrimoine légué aux règles de la curatelle et de la tutelle. Il permet plus de souplesse sur le plan de l’administration, car les pouvoirs d’un fiduciaire sont plus étendus que ceux d’un tuteur.

Dans la prochaine chronique, nous aborderons les rôles du tuteur et du mandataire.