/  19 juin 2003

Actions ou obligations ?

Des données compilées par la firme Morningstar indiquent qu’au cours des 15 dernières années1, le rendement moyen d’un fonds d’obligations canadiennes a été de 8,2 % alors que celui d’un fonds d’actions canadiennes a été de 8,1 %. Ces chiffres vous incitent peut-être à conclure qu’une personne qui aurait investi 50 % de son REER en obligations et 50 % en actions aurait obtenu un rendement se situant entre 8,1 et 8,2 %. En pratique, nos calculs nous amènent à conclure que cette personne aurait obtenu un rendement de 8,3 %!

Pour obtenir ce résultat, nous avons supposé que l’investisseur rééquilibrait son portefeuille au début de chaque année afin d’avoir en tout temps la même répartition désirée, soit 50-50. Pour ce faire, il vendait la classe d’actif ayant eu la meilleure performance l’année précédente et achetait celle ayant connu une performance faible. En réalité, beaucoup d’investisseurs font exactement le contraire! Ils investissent leur cotisation REER dans la classe d’actif qui a connu la meilleure performance l’année précédente.

Nous avons donc fait l’exercice afin de mesurer les conséquences sur l’accroissement du capital de retraite. La personne qui aurait investi dans son REER le maximum annuel autorisé aurait déboursé 181 500 $ en 15 ans2. En investissant la totalité en actions, son capital de retraite se chiffrerait à 310 000 $ 15 ans plus tard; en investissant la totalité en obligations, ce même capital totaliserait 315 000 $; en investissant moitié-moitié, il serait de 317 000 $. Comme nous l’avons mentionné précédemment, les rendements moyens obtenus auraient été respectivement de 8,1 %, de 8,2 % et de 8,3 % (tableau 1).

L’investisseur qui aurait choisi le véhicule de placement ayant généré les meilleurs rendements au cours des 12 mois précédents aurait obtenu un rendement de 6,6 %, pour un capital accumulé de 273 000 $. Dès lors, une conclusion s’impose : le rendement des 12 deniers mois n’est pas un bon indicateur du rendement de l’année à venir.

Nous illustrons au tableau 2 les écarts de rendement assez importants qu’on peut observer, d’une année à l’autre, à l’intérieur d’une même classe d’actif. Ainsi, toute personne qui tente d’identifier la classe d’actif. Ainsi, toute personne qui tente de repérer la classe d’actif qui procurera le meilleur rendement dans l’année à venir expose son portefeuille à un risque considérable, compte tenu de l’écart important qui sépare chaque année les rendements des actions de ceux des obligations. Au cours des 15 dernières années, l’écart moyen a été de 10 %. On comprend dès lors pourquoi de nombreux investisseurs professionnels (fonds mutuels, caisses de retraite) préfèrent ne pas courir ce risque et adopter, en tout temps, une politique de placement comprenant une répartition d’éléments d’actif fixe (par exemple, 60 % d’actions et 40 % d’obligations).

Les experts vantent souvent les mérites d’une approche consistant à établir une politique de placement et à poursuivre la stratégie adoptée dans le temps, sans se soucier des fluctuations à court terme des marchés. À cet égard, notons qu’il est beaucoup plus facile de maintenir une stratégie lorsque le portefeuille comprend à la fois des actions et des obligations. Les déceptions des investisseurs ayant tout placé en obligations en 1999 en sont une illustration convaincante : en 12 mois seulement, ils ont vu leurs portefeuilles afficher une performance inférieure de 24 % à celle des portefeuilles d’actions! Qui aurait eu les nerfs assez solides pour ne pas en transférer une partie en actions, et ce, juste au moment où les obligations allaient voler la vedette pendant les trois années qui ont suivi?

Globalement, les résultats des 15 dernières années peuvent inciter certaines personnes à remettre en question la pertinence d’inclure des actions dans leur portefeuille, et ce, d’autant plus qu’un portefeuille composé à 100 % d’obligations aurait procuré un rendement supérieur et à moindre risque (volatilité).

D’abord, il faut savoir que cet exercice a été fait alors que le marché boursier était à la baisse depuis 28 mois et que le marché obligataire atteignait des sommets pratiquement jamais inégalés. Ensuite, il faut se rappeler que les 15 dernières années ont été effectivement marquées par une baisse importante des taux d’intérêt, un contexte idéal pour le marché obligataire.

Comme vous pouvez le constater une fois de plus aujourd’hui, le plus vieux principe en gestion de portefeuille demeure plus pertinent – et rentable! – que jamais. Il faut en effet diversifier son portefeuille, de façon à ce qu’il contienne des actions et des obligations.

À bon investisseur, salut!

 

1 Les rendements ont été compilés au 31 décembre 2002.
2 Nous avons utilisé le plafond REER qui était de 7 500 $ de 1988 à 1990, de 11 500 $ en 1991, de 12 500 $ en 1992 et en 1993, de 13 500 $ en 1994, de 14 500 $ en 1995 et de 13 500 $ par la suite.