/  18 décembre 2005

Omettre de cotiser à un REER, c’est risquer de compromettre sa retraite

Alors qu’une majorité de contribuables canadiens dépendront d’un régime enregistré d’épargne-retraite (REER) pour vivre leur retraite comme ils le souhaitent, beaucoup d’entre eux n’en ont pas ou n’y cotisent pas suffisamment pour maximiser les avantages fiscaux qu’il comporte.

Selon l’Agence des douanes et du revenu du Canada, environ quatre (4) contribuables québécois sur cinq (5) avaient le droit de cotiser à un REER en 2004. Or, seulement le tiers d’entre eux s’en sont prévalus. Pour une cinquième année consécutive, la cotisation médiane (celle qui sépare en deux parties égales le nombre de cotisants) de quelque 1,53 million de Québécois s’est élevée à 2 400 $.

Pourtant, comme l’indiquent des sondages effectués par les firmes CROP et Environics, il existe une discordance entre les aspirations des travailleurs et leur style de vie réel, une fois devenus retraités. Si 26 % de ces derniers déclarent n’avoir pas réalisé leurs rêves principalement à cause de ressources financières limitées, 16 % imputent cette impossibilité à des problèmes de santé.

Le début de l’année, période par excellence pour planifier… et cotiser

En ce qui concerne la déclaration de revenus pour l’année 2005, la date limite pour cotiser à un REER est le 1er mars 2006. Il est possible d’y verser 18 % des revenus admissibles de 2004, jusqu’à un maximum de 16 500 $, moins le facteur d’équivalence (FE) dans le cas des personnes qui participent à un régime de pension agréé ou à un régime de participation différée aux bénéfices.

Attendre la date limite permise pour cotiser à un REER est une décision coûteuse pour les retardataires. En investissant de cette façon, trop de gens évaluent mal le placement qu’ils choisissent et ne pensent qu’à l’économie d’impôt qu’ils réalisent. Or, le rendement est un élément extrêmement important à prendre en considération.

Attention au rendement !

Le tableau ci-dessous permet d’évaluer la différence entre les revenus accumulés en raison de contributions annuelles de 16 500 $ (le maximum permis pour l’année d’imposition 2005), dont les rendements annuels composés moyens sont respectivement de 6 %, de 7 % et de 8 %.

Gare aux honoraires de gestion !

Face à deux fonds équilibrés similaires offrant un rendement comparable, mais dont les honoraires de gestion sont respectivement de 1 % pour le premier et de 3 % pour le second, le premier fond s’avère plus avantageux, car la différence de 2 % profite au portefeuille de l’investisseur. Dans l’exemple ci-dessus, l’actif accumulé après 35 ans aurait été supérieur de 58 % (3,1 millions $ contre 1,9 million $).

Même si l’on cotise à la dernière minute, il est important de s’informer des honoraires de gestion, à défaut de quoi on risque d’être pénalisé.

Cotiser en 2006, demander la déduction plus tard

Beaucoup d’investisseurs l’ignorent, mais il est possible de cotiser, dès le début de l’année, à un REER pour l’année d’imposition en cours. Pour 2006, le maximum permis est de 18 000 $. Il sera de 19 000 $ en 2007, de 20 000 $ en 2008, de 21 000 $ en 2009, et de 22 000 $ en 2010. Par la suite, ce plafond sera indexé annuellement.

Si vous prévoyez déclarer un revenu faible en 2006, vous pourriez avoir avantage à cotiser le maximum permis au REER, et ce, malgré votre taux d’imposition peu élevé (congé de maternité, congé sabbatique, retour aux études, etc.). La raison est fort simple : même si vous contribuez à votre REER en 2006, vous n’êtes pas tenu pour autant d’utiliser la déduction pour l’année d’imposition correspondante. Vous pourriez, par exemple, faire fructifier vos investissements à l’abri de l’impôt immédiatement, puis utiliser la déduction quelques années plus tard, lorsque votre taux marginal d’imposition sera vraisemblablement supérieur. Votre retour d’impôt n’en sera alors que plus important.

Cette astuce est surtout recommandée pour une personne qui commence à investir dans un REER, mais dont les revenus limités sont susceptibles d’augmenter de façon significative dans un proche avenir. C’est notamment le cas des étudiants ou des personnes qui bénéficient d’un congé parental.

La prudence est de mise

Avant de reporter une déduction REER à une année ultérieure, il est recommandé d’effectuer une simulation fiscale afin de bien évaluer toutes les répercussions de cette décision. En effet, il ne faut pas se fier uniquement à son taux d’imposition marginal pour connaître l’économie d’impôt inhérente à une cotisation à un REER. Il faut également tenir compte des nombreux crédits d’impôts et autres allégements fiscaux qui sont partie intégrante du régime fiscal et qui, à compter d’un certain seuil de revenus, sont restreints, voire carrément éliminés.

Le nouveau paiement de soutien aux enfants, mis en place l’an dernier par le gouvernement du Québec, est un bon exemple.

Ce paiement annuel est de 2 000 $ pour un 1er enfant, de 1 000 $ pour les 2e et 3e enfants et de 1 500 $ pour les autres. Il est réduit pour les familles ayant un revenu supérieur à 42 800 $. En pratique, il est diminué de 4 % pour les revenus supérieurs à 42 800 $, avec cependant l’assurance de pouvoir toucher un minimum de 561 $ pour le 1er enfant et de 517 $ pour les suivants.

Le graphique ci-dessus illustre la situation d’un couple avec deux enfants. On constate que, pour un ménage dont le revenu familial se situe entre 42 800 $ et 90 850 $, une cotisation à un REER permet une économie d’impôt additionnelle de 4 %, grâce à un paiement de soutien aux enfants plus élevé. Et nous n’avons pas tenu compte de la prestation fiscale pour enfants du gouvernement fédéral, des crédits de TPS et de TVQ, des crédits pour frais médicaux, du crédit pour personne vivant seule, du taux de crédit pour frais de garde d’enfants, du remboursement d’impôts fonciers, etc.

Les droits de cotisation sont-ils pleinement utilisés ?

Les personnes qui, depuis 1991, n’ont pas versé les cotisations maximales autorisées, doivent savoir qu’elles peuvent ajouter, à leur REER, une somme correspondant à leurs droits de cotisation inutilisés. Cette somme est inscrite sur l’avis de cotisation annuel transmis par l’Agence du revenu du Canada.

Cotiser au REER de son conjoint

Si le revenu d’une personne est supérieur à celui de son conjoint à la retraite, elle aurait avantage à considérer la possibilité de cotiser au REER de ce dernier.

En pratique, elle verserait des cotisations dans le REER de son conjoint jusqu’à concurrence du montant maximal auquel elle a droit, sans réduire pour autant ses propres droits de cotisation. Elle bénéficierait ainsi d’une déduction identique à celle qu’elle aurait obtenue si elle avait cotisé à son propre REER.

Toutefois, lorsque le temps sera venu d’encaisser le REER, seul le détenteur du régime (le conjoint, le cas échéant) sera imposé sur le montant du retrait. En supposant que ses revenus annuels soient inférieurs, l’impôt à payer sera alors moindre que si le retrait avait été fait de son REER. De plus, si le conjoint est plus jeune que la personne qui contribue, l’argent pourra demeurer dans le REER plus longtemps, la limite étant fixée à la fin de l’année où le détenteur atteint l’âge de 69 ans. Pourquoi ne pas en profiter ?

Un « coussin », c’est bien

En terminant, il faut noter qu’il est aussi permis de cotiser jusqu’à 2 000 $ en sus des cotisations mentionnées précédemment, et ce, sans pénalité.

Bien qu’il ne soit pas déductible dans l’année, ce « coussin » produit des revenus à l’abri de l’impôt, tant et aussi longtemps que la somme investie demeure dans le REER. Quant à la cotisation, elle devra être déduite du revenu au cours d’une année à venir, au plus tard la dernière pour laquelle des droits de cotisation sont possibles.

Cotiser au maximum fait toute la différence !

L’exemple qui suit présente un investisseur qui commence à cotiser à un REER cette année. Le tableau indique la différence entre les trois situations correspondant à chacune des courbes illustrées :

Rendements annuels composés moyens de 7 %

Courbe A
Le plafond REER ayant été longtemps fixé à 13 500 $, nous avons simulé une cotisation annuelle de 13 500 $ faite durant les 30 prochaines années (total des cotisations versées : 405 000 $). Le capital accumulé est alors de 1 364 486 $.

Courbe B
Le plafond REER ayant été augmenté progressivement au fil des ans pour atteindre 18 000 $, nous avons simulé une cotisation annuelle qui débute à 13 500 $ et qui augmente jusqu’à 18 000 $ dès la cinquième année de cotisation. Par la suite, ce montant est investi pour les années restantes à cotiser (total des cotisations versées : 528 000 $). Le capital accumulé s’élève à 1 734 217 $.

Courbe C
La cotisation annuelle débute à 13 500 $ et augmente annuellement selon les plafonds permis et prévus (actuellement jusqu’à 22 000 $ et indexés par la suite). La cotisation est donc indexée pour les années subséquentes restantes à cotiser (total des cotisations versées : 773 000 $). Le capital accumulé atteint alors 2 237 180 $.

Que conclure ?

Il est intéressant de constater que l’augmentation significative des plafonds REER depuis quelques années permet de constituer un portefeuille REER qui remplacera de plus en plus une importante portion du revenu de vie active au travail.

Il est important de ne pas perdre de vue que le capital de plus de 2 000 000 $ atteint dans une trentaine d’années (voir la courbe C) équivaut à environ 1 000 000 $ en dollars d’aujourd’hui, en supposant une inflation annuelle d’environ 2,5 % au cours des 30 prochaines années.